Première mondiale – Un ciment écologique à partir d’algues

Une équipe américaine a produit du ciment grace à des algues communes, pour aider à produire un béton écologique et innovant.

Produire du ciment écologique, négatif en CO2 et en polluants, grâce à des algues, voilà la résultat d’une équipe américaine.

Chaque année, environ deux gigatonnes – en chiffre : 2 000 000 000 000Kg – de CO2  sont dégagés dans l’atmosphère en raison de la production et de l’utilisation du ciment. 

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Agence de Protection de l’Environnement

Selon un rapport de l’EPA (Agence de Protection de l’Environnement des États-Unis), le ciment se classe donc au troisième rang des dix principales sources de pollution industrielle

Une équipe de chercheurs affirme que nous pourrions mettre un terme à une partie de ces émissions de carbone du jour au lendemain, en remplaçant le ciment traditionnel par un nouveau ciment d’origine biologique, à base de microalgues. Un ciment fabriquée donc à partir d’organismes vivants.   

Un nouveau mode de production innovant et vert

Une équipe de scientifiques de l’Université du Colorado, travaillant avec leurs collègues du National Renewable Energy Laboratory (NREL) et de l’Université de Caroline du Nord, a mis au point une méthode unique et neutre en carbone.

En l’utilisant, le ciment Portland peut être produit à partir de calcaire cultivé biologiquement . 

« En 1824, c’est le Britannique Joseph Aspdin qui dépose un brevet pour un ciment qu’il appelle « ciment Portland ».

Le nom de Portland est dû à la similarité qu’il présente avec la pierre de Portland, dont les carrières sont pourtant situées sur la côte du Dorset, à près de 400 kilomètres de Leeds.

Le brevet prévoit qu’un mélange de poussière d’argile et de calcaire est aggloméré par l’eau et la chaleur jusqu’à évacuation de son eau. Le résultat est réduit en poudre et calciné dans un four à calcination tels qu’on les concevait alors pour la production de la chaux. »

Ciment Portland – Wikipédia

Ce nouveau matériau pourrait alors réduire considérablement la pollution causée par les activités de construction, dans le monde entier.

Ciment traditionnel vs ciment de calcaire biologique

Le béton est principalement fabriqué à partir de ciment portland, avec ajout d’eau et de gravier, et est considéré comme le matériau le plus consommé à travers le monde. 

Que ce soit en Europe, en Amérique du Nord, ou en Asie, la construction ne peut se concevoir sans le béton et donc, sans le ciment portland. La France est d’ailleurs le premier producteur européen de ciment portland.

Pourtant, la production commerciale massive de ciment portland implique l’incinération de très grandes quantités de calcaire, entraînant des émissions massives de CO2. De plus, la qualité de l’air dans les zonez de production de ciment est fortement compromise, car la combustion du calcaire libère plusieurs polluants et gaz toxiques. 

La solution à ce problème serait apparue au professeur Wil Srubar, en 2017, lors d’un voyage en Thaïlande.

Le professeur Srubar a alors remarqué des structures de carbonate de calcium (E170 / CaCO3), naturellement construites, autour des récifs coralliens, lors de son voyage. En regardant les gisements de CaCO3, il lui est venu à l’esprit que peut-être que le calcaire peut aussi être cultivé naturellement, au lieu d’être extrait des carrières. 

Il s’est demandé : « Si la nature peut faire pousser du calcaire, pourquoi pas nous ?

À son retour aux USA, lui et son équipe ont décidé de cultiver des microalgues appelées coccolithophores. 

Des organismes qui vivent dans le fond des océans. Du phytoplancton minuscule, mais dont le rôle apparaît fondamental, tant dans la chaîne alimentaire – les petits poissons en raffolent – que dans le processus de fixation du carbone.

Coccolithophores
Coccolithophores Ciment Bio Ariel Paper 2022
Coccolithophores

Les membres de cette famille d’algue sont capables de donner naissance à du calcaire organique, en créant des dépôts de CaCO3 (carbonate de calcium), lors de la photosynthèse. Les chercheurs ont observé que, contrairement au calcaire naturel qui met des millions d’années à se former sous le sol, la version biologique des coccolithophores peut être produite « presque en temps réel ».

« Nous fabriquons plus de béton que tout autre matériau sur la planète, et cela signifie qu’il touche la vie de tout le monde. »  

Autre point positif, les coccolithophores produisent du carbonate de calcium en beaucoup moins de temps que les récifs coralliens, observés par le professeur Srubar en Thaïlande. 

La matière première nécessaire à la formation de calcaire « bio » dans l’eau de mer ne comprend que du dioxyde de carbone, dissous, et de la lumière. De plus, comme ces microalgues peuvent survivre en eau douce comme en eau salé, elles peuvent être utilisées pour « faire pousser » du calcaire presque partout dans le monde.

Le calcaire cultivé avec les algues : l’avenir ?

Les chercheurs affirment que la production de calcaire à partir de coccolithophores est si facilement productible et réalisable que répondre à la demande totale de ciment aux États-Unis, il ne faudrait que produire une « usine » sur un plan d’eau couvrant une surface d’environ 8000km2. 

« Cela ne prendrait que 0,5% de toutes les terres disponibles dans le pays.« 

A titre de comparaison, cette surface représente tout de même environ 1,5% de la surface totale de la France Métropolitaine (543 940km2)

Plus encore, la production de ciment à partir de calcaire issus d’algues est non seulement neutre en carbone, mais même négatif, car les microalgues éliminent le dioxyde de carbone (CO2) de l’environnement, et le stockent sous forme de carbonate de calcium. 

Par conséquent, le béton formé à partir de ce ciment pourrait amorcer un mode de construction plus durable dans le monde, destiné à garder captif le CO2 inclus. 

« Pour l’industrie, il est maintenant temps de résoudre ce problème très épineux. Nous pensons que nous avons l’une des meilleures solutions, sinon la meilleure solution, pour l’industrie du ciment et du béton pour résoudre son problème de carbone »

Pour cette extraordinaire découverte et innovation, le professeur Srubar a reçu le prix CAREER de la National Science Foundation, en 2020. Le communiqué indique aussi que son équipe a reçu une subvention de 3,2 millions de dollars du Département américain de l’énergie (DOE). 

Ils se sont également associés à des acteurs privés, pour intensifier les activités de R&D liées au calcaire biologique. 

Le professeur Srubar et ses collègues pensent que leur matériau révolutionnaire a tout le potentiel pour remplacer le calcaire extrait et sauver la planète de tous les dommages environnementaux qu’il cause.

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